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jeudi 6 septembre 2012

Le « cloud computing » prend un nouveau virage en France

LesEchos.fr du 7/09/2012

Le projet Andromède a finalement débouché cette semaine sur la création de deux nouvelles sociétés soutenues par l'Etat à hauteur de 150 millions d'euros au total.


La France deviendra-t-elle une grande puissance du « cloud computing » ? Elle dispose en tout cas des moyens d'assouvir ses ambitions, pour mieux rivaliser avec le géant américain. Deux nouvelles sociétés ont en effet vu le jour cette semaine : Numergy, soutenu par SFR et Bull, et Cloudwatt, issu de l'association d'Orange et de Thales (lire ci-dessous). Tous deux ont reçu le soutien de l'Etat, la Caisse des Dépôts ayant injecté 75 millions d'euros dans chaque structure. Leur vocation : mettre à disposition des entreprises et de l'administration françaises des infrastructures informatiques capables d'héberger des données et des applications, accessibles à distance et sécurisées.
La genèse du projet de « cloud » à la française, baptisé dans un premier temps « Andromède », remonte à 2009. Il a été initié par le gouvernement de l'époque dans le cadre du grand emprunt. « Il faut absolument être capable de développer une alternative française et européenne dans le domaine du "cloud computing" », avait déclaré le Premier ministre, François Fillon, en janvier 2010. Pour le gouvernement, l'objectif est avant tout stratégique. Il s'agit de préserver la souveraineté des données des entreprises françaises en assurant leur hébergement sur le territoire national, dans des infrastructures établies en France. C'est aussi l'occasion de concurrencer les grands groupes américains comme IBM, HP ou Amazon, par ailleurs soumis à la loi antiterroriste du Patriot Act, qui les oblige à fournir aux autorités américaines - si elles le demandent et sous certaines conditions -les informations stockées dans leurs serveurs. Bien que réel, le risque existe, tout comme des données stockées en France pourraient être transmises aux autorités en cas de décision judiciaire.
L'enjeu est également économique. Le marché du « cloud » est en pleine expansion. Selon SFR, il pourrait peser 3 milliards d'euros en 2016 en France. « Le projet de "cloud" à la française peut s'apparenter à une nouvelle forme de politique industrielle avec la création de champions nationaux, estime Matthieu Poujol, analyste chez Pierre Audoin Consultants. Les actionnaires qui ont permis la création de Numergy et de Cloudwatt sont eux-mêmes des leaders dans leur domaine. »

« Distorsion de concurrence » 

Cette nouvelle concurrence n'effraie pas les mastodontes américains. Pour IBM, il s'agirait presque d'un non-événement. « La concrétisation de ces deux projets valide simplement notre stratégie, considère Christian Comtat, directeur de la division "cloud computing" chez IBM France. Depuis 2009, nous avons investi plus de 300 millions d'euros en France pour construire nos offres. » La firme met à disposition des entreprises cinq « data centers » dans l'Hexagone, tout en laissant le choix à ses clients d'héberger ses données ailleurs s'ils le souhaitent. « On a un temps d'avance sur le sujet. » Pas d'inquiétude non plus du côté de HP, qui dit voir d'un bon oeil l'arrivée de nouveaux acteurs. « Le marché grandit. De nouvelles opportunités vont se créer et c'est tout l'écosystème informatique qui en profitera », commente Jean-Marc Defaut, directeur alliances et développement chez HP France.
Si les groupes américains ont effectivement de quoi voir venir, les petites sociétés françaises d'hébergement informatique pourraient en revanche se sentir menacées. Certaines n'hésitent pas à dénoncer l'intrusion de l'Etat. « C'est clairement de la distorsion de concurrence », s'emporte Jules-Henri Gavetti, le patron d'Ikoula. Basée à Reims, l'entreprise réalise 6 millions d'euros de chiffre d'affaires et emploie 50 salariés. « Nous n'avons bénéficié de quasiment aucune aide et nous allons nous retrouver face à des produits labellisés par l'Etat. On pourrait être tenté d'aller se développer à l'étranger », regrette le dirigeant de cette PME.

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